Justine, intervenante en prévention du suicide (DEASS France) au Québec
Diplôme(s) en travail social et pays d’étude
Diplôme d’État Assistante de service social en France
Pays où tu exerces
Québec au Canada
Structure ou établissement dans lesquels tu travailles
Suicide Action Montréal et Suicide.ca
Titre d’emploi actuel
Intervenante en prévention du suicide
Public que tu accompagnes / auprès de qui tu offres tes services en travail social
Suicide Action Montréal (SAM) : résidents de Montréal francophones et anglophones, mais aussi francophones hors Québec.
Suicide.ca : littéralement tout le monde au Canada (voire ailleurs parfois, même si nous sommes normalement un service canadien).
Dans les deux cas, nous offrons des services pour les enfants, adultes et professionnels qui pensent au suicide, sont endeuillés par le suicide, ou inquiets pour un proche qui penserait au suicide.
Bonus lecture internationale
SAM a mis en ligne des outils de sensibilisation
Il existe aussi différentes pages Facebook intéressantes si vous travaillez ou souhaitez travailler au Canada ou Québec :
- Intervenant.e.s psychosociaux Montréal
- Francophones ImmigrantEs au Québec exerçant dans le Social [FIQS]
Puis un classique pour ouvrir ses horizons : Didier Dubasque : Écrire pour et sur le travail social
Selon toi, quelles sont les problématiques sociales les plus prédominantes dans ton pays ?
Je n’ai pas (encore) fait le tour du Canada qui est un pays gigantesque… pour le moment, je dirais qu’il y a une prédominance pour les problématiques liées à l’itinérance, l’addictologie et la santé mentale.
J’ai le sentiment qu’il y a un réel enjeu de bien être mental au Canada. Les raisons sont variées : difficile accès aux services en ville ou en campagne, dureté de la vie (de l’hiver, pour certains), difficile accès et maintien au logement, isolement social ou géographique, racisme, et bien entendu Covid / confinements / mesures aléatoires…
J’ai aussi été étonnée de la forte précarité présente à Montréal.
Quelque chose qui est plus propre au Canada : toutes les discriminations diverses envers la population autochtone (logement, accès aux soins, travail…).
Selon toi, en quoi le travail social a sa place dans ton pays ?
Le travail social a sa place partout !
Le travail social, qu’il soit public ou communautaire, tient une place centrale au Canada. L’Amérique du Nord a par exemple été l’un des pionniers dans la réduction des méfaits, et les travailleurs sociaux ont un rôle essentiel dans l’intégration des immigrés et le soutien aux Premières Nations.
Les services ont su évoluer pour répondre aux problématiques variées rencontrées aussi bien par des citoyens canadiens des villes que de ceux qui vivent dans des réseaux extrêmement isolés.
Je crois que sans le soutien de nombreux organismes communautaires / services de premières lignes, beaucoup de personnes en attente de suivi médical, psychologique ou autre, seraient sans ressources.
Nous avons donc la chance d’avoir de nombreux organismes qui portent à bout de bras la population canadienne.
À l’heure actuelle, pourquoi choisir cette profession ?
Parce que nous avons tous besoin, à un moment de notre vie, d’un coup de pouce, d’une oreille attentive, de quelqu’un qui nous aide à faire un pas de plus.
En prévention du suicide, les histoires sont parfois lourdes, difficiles, mais tellement belles ! En ces temps de Covid et d’incertitudes, il fait bon de s’intéresser aux autres, à ce qui les maintien en vie, à comment cette pandémie a bousculé leur vie pour le pire, mais aussi parfois pour le meilleur…
En tant qu’immigrée, j’apprécie d’apprendre la pratique d’un autre pays. Le Canada m’a permis d’appréhender une nouvelle manière de travailler dans le social. J’ai vu des choses qui ne m’ont pas trop correspondu, et des techniques qui ont changé pour le mieux mes interactions et mes interventions. Choisir cette profession, c’est avoir l’occasion d’apprendre tous les jours.
S’enrichir de nouvelles pratiques permet non seulement de mieux soutenir toute personne dans le besoin, mais aussi de grandir soi-même et de devenir, je l’espère, un être humain davantage curieux et bienveillant.
Selon toi, quel serait l’avenir idéal du (travail) social dans ton pays ?
L’avenir idéal serait fait de plus de moyens humains, matériels, financiers pour offrir davantage de services psycho-médico-sociaux abordables pour tout type de population. Il y a encore bien trop de personnes qui ne demandent pas d’aide, qui sont découragées du fait des longues listes d’attente, ou des prix exorbitants des services. Quand on sait qu’accéder à un.e médecin ou un.e psychologue peut prendre des années au Québec, ou que les intervenants et travailleurs sociaux sont complètement débordés par des centaines de dossiers…!
La santé mentale et le bien-être, qu’il soit individuel, communautaire ou collectif, devraient être au cœur des priorités gouvernementales. Surtout en ces temps de Covid, générateurs de détresses multiples, que ce soit autant lors de mesures restrictives que de mesures permissives.
Dans la même idée : plus de reconnaissance pour les intervenants du communautaire, des ONG, OBNL et travailleurs sociaux ! Mais c’est un peu partout pareil, non…?
Que souhaites tu partager pour le mois du travail social 2022 ?
Déjà, que je suis fière de ma job !
J’appellerai aussi mes collègues d’ici et d’ailleurs à plus d’autocompassion ! Soyez fier.e.s de vous, de ce que vous apportez aux autres, de l’aide que vous demandez parfois, de prendre du temps pour vous aussi… Nous faisons un métier (des métiers ?) magnifique et exigeant. Apprenons à nous féliciter, à respecter notre propre bien-être, à faire une pause.